L'Inde
Parfois c’est difficile d’exprimer ce que l’on vit à travers un voyage et je crois que ça l’est encore plus dans le cas de l’Inde. Néanmoins, j’ai tenté de mettre en mot mon expérience comme je l’ai vécu, décousue, reflétant la réalité d’une journée chargée de surprises.
État | Distance parcourue |
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Himachal Pradesh (Delhi - McLeod Ganj) | 1484 km |
Punjab (McLeod Ganj - Bikaner) | 723 km |
Rajasthan (Bikaner - Ahmedabad) | 1146 km |
Gujarat (Ahmedabad - Ahmedabad) | 1589 km |
UP, MP, Kolkata (Ahmedabad - Kolkata) | 2449 km |
Total | 7391 km |
The only rule in India is that there are no rules
Delhi
- Choc assez intense en sortant du taxi m’amenant de l’aéroport à Paharganj, le quartier backpacker de Delhi. La grande quantité de stimuli en compétition pour mon attention est étourdissante, presque surréelle.
- Beaucoup de gens rencontrés dans la rue travaillent dans un centre d’appel, opérant de nuit pour accommoder les heures de travail de l’Amérique.
- Visite du marché dans le vieux Delhi: éleveur de faucons, moteurs, compresseurs, tapis, outils de construction, chèvres et vêtements se partagent le pavé.
- Tentative de faire voler un cerf-volant avec des enfants, c’est beaucoup plus difficile que ça en a l’air. C’est une habileté que j’aimerais bien développer.
- Coupe de cheveux et massage de tête brutal, mais non déplaisant.
- Je sens régulièrement que ma “bulle” est envahie. J’espère que je vais m’habituer, présentement elle est beaucoup trop grande pour un pays où les gens vivent collés les uns sur les autres.
Malgré la foule, les odeurs, les déchets et la saleté, le harcèlement des chauffeurs de rickshaw et la chaleur, marcher dans la rue a quelque chose de grisant. On ne sait jamais à quel moment on va tomber sur quelque chose d'intéressant.
Himachal Pradesh
La nuit se lève et je suis assied sur un banc de la gare de bus de Rampur, discutant avec quelques jeunes intéressés à en savoir plus sur l’occident. Après quelque temps, un homme dans la trentaine assis sur le banc d’à côté engage la conversation et me propose du whisky. Légèrement sur mes gardes, nous discutons sérieusement, touchant des sujets inaccessibles pour la plupart des Indiens peu éduqués. Cela et son anglais exemplaire me convainquent d’accepter lorsqu’il propose de m’héberger. Il fait noir depuis un moment et nous roulons en taxi sur une petite route de terre longeant la rivière Sutlej, encastrée plusieurs centaines de mètres au fond d’un ravin. Nous nous arrêtons à mi-chemin et buvons quelques verres sous les étoiles.
Mukesh est instruit, il s’exprime en anglais de manière éloquente et son esprit est vif. Il est également déprimé, son éducation supérieure à la moyenne le place dans l’inconfortable position d’observateur impuissant de son peuple. Au petit matin, les voisines de palier, deux femmes divorcées et leurs enfants, m’accueillent et m’offrent le spectacle époustouflant du départ désorganisé d’une famille indienne pour l’école et le travail.
- Pour la durée du voyage je vais faire l’expérimentation de manger végétarien et de ne pas consommer d’alcool. En plus de diminuer les risques d’être malade, je suis curieux de voir les effets que ça aura sur moi.
- Durant les 2 premières semaines j’ai beaucoup de difficulté avec l’absence de “merci”, “s’il vous plaît” et autres formules de politesse courantes au Québec. Je réalise à quel point les codes usuels de communication sont importants et je fais un effort conscient pour accepter qu’ici c’est à moi de s’adapter.
- Lors d’une randonnée dans des pâturages à mi-montagne, je tombe sur une petite maison où quelques paysans battent le fourrage pour en extraire les grains. J’empoigne un bâton et leur donne un coup de main, puis ils me montrent à faire des tresses avec le foin et à tamiser le grain en utilisant le vent.
- Rencontre de Christina, une Belge vivant en Inde depuis 20 ans. Elle s’occupe d’un chiot en piètre état qui vient d’être attaqué par un autre chien. Elle est également responsable de la librairie du monastère de Tabo et me recommande plusieurs livres sur le bouddhisme et le courant zen.
Lecture de The Dharma Bums de Jack Kerouac
Lecture de The White Tiger de Aravind Adiga
Au fur et à mesure que j’avance vers la vallée de Spiti, plus le paysage devient austère, les drapeaux de prières bouddhistes fréquents et la nourriture composée de blé et de pommes de terre. J’entreprends seul un trek de 5 jours qui me fera passer par 5 villages isolés en bordure du Tibet. Je rejoins le premier village en soirée, après avoir perdu le sentier et marché sous le halo d’une lune presque pleine. J’arrête pour demander mon chemin dans une maison. Un homme répond et m’invite à rester pour la nuit. Soirée agréable à manger et à discuter avec l’hôte, qui semble instruit et à l’aise financièrement. Je me lave à l’eau glaciale sous le regard amusé d’un jeune chargé de s’occuper de moi et me glisse avec satisfaction dans mon sleeping de duvet. Je marche de 4 à 6 heures par jour à une altitude variant de 3000m à 4800m, j’ai donc amplement le temps d’observer la vie rustique des villageois. Sur mon chemin s’alternent stupas, drapeaux de prières, enfants jouant au criquet et vielles femmes faisant sécher des bouses de vaches au soleil. Je passe mes soirées chez l’habitant avec qui j’apprends à préparer la Thukpa (soupe de nouilles) et les Momos (dumpling), deux spécialités tibétaines riches en pâte de blé et pommes de terre.
- Un monsieur étrange vient d’entrer dans ma chambre alors que j’écoute la télé, couché sur le lit. Il commence à uriner dans la salle de bain, se lave les mains pendant 3 longues minutes et ressort comme si de rien n’était.
- Baignade dans les sources thermales et sulfureuses de Manikaran.
- Rencontre avec un Américain et une Canadienne, tous deux vivant dans un ashram et suivant un maître spirituel, ou guru. Ils m’exposent la théorie selon laquelle le monde matériel émane de la conscience, et non l’inverse, ce qui pour moi est une nouvelle manière de voir le monde qui alimente mes réflexions à ce sujet. Excellent article sur les enjeux d’une telle croyance: Two Very Different Reasons to Believe Something.
- Randonnée éprouvante de Naggar vers Malana, un village isolé cultivant la marijuana et où les étrangers n’ont pas le droit de toucher aux habitants, aux bâtiments, ni de marcher hors de sentiers prédéterminés.
- Visite de McLeod Ganj et des villages environnants, lieu de résidence du Dalaï-Lama et principal refuge des Tibétains fuyant leur pays occupé par la Chine.
- Je commence à voyager avec Michael, un voyageur Torontois avec qui je partage plusieurs atomes crochus.
- Visite du Norbulingka Institute, un organisme qui vise à conserver le savoir-faire et les arts ancestraux tibétains. C’est fascinant de constater que pour conserver une tradition, le meilleur moyen est de la pratiquer. Ainsi des artisans s’affairent dans différents ateliers au travail du bois, du métal, des tissus et à la peinture.
L'Inde est peut-être la société la plus individualiste que j'aie rencontrée.
Punjab
Séjour marquant à Amritsar, berceau du Temple d’Or où les pèlerins sikhs affluent en grand nombre. Les visiteurs, sans égard à leur religion ou leur provenance, sont hébergés et nourris gratuitement par des organismes et des bénévoles. L’hospitalité et l’égalité sont des valeurs centrales de leur religion. L’endroit pour manger (Langar) est une machine bien rodée, servant près de 40 000 repas par jour. L’expérience d’y manger, d’y faire la vaisselle et d’observer les machines fabriquant les chapatis restera longtemps gravée dans ma mémoire.
En quittant Amritsar, nous passons par Faridkot, un petit village endormi où Michael et moi rencontrons un groupe d’enfants dont un, Rahul, nous invite à souper chez lui. Nous nous retrouvons à mâcher de la canne à sucre, assis sur l’unique lit occupant presque toute la petite pièce dans laquelle la famille vit. Sous l’oeil attentif de la maisonnée, on nous sert un repas typique du nord: riz, pommes de terre et choux-fleur, pommes de terre et curd (lait caillé).
Départ du grenier de l’Inde vers le Rajasthan, nous traversons des champs de coton, de riz et de diverses céréales à perte de vue. Des troupeaux de bêtes et des tracteurs chargés de foin se partagent la route avec l’autobus déglingué dans lequel nous sommes. Au fil des heures, le paysage devient de plus en plus désertique, la température augmente et quelques chameaux commencent à apparaître sur les bords de routes. Près de 10 heures plus tard nous émergeons de la poussière et arrivons enfin à Bikaner.
Rajasthan
Rencontre de deux Québécois qui nous invitent à discuter avec leur chef spirituel. Curieux, nous acceptons et nous nous rendons à l’ashram qui se trouve à Udaipur. L’endroit est une maison moderne logeant 5 étudiants, dont 4 Québécois(es). À en juger très rapidement, les étudiants semblent légèrement simples d’esprit, instables émotionnellement et naïfs. Nous méditons et discutons sous la direction du guru, une expérience très particulière et peu sérieuse, quoique les étudiants y croient dur comme fer. J’ai commencé à douter sérieusement lorsque le maître a pris ma tête et l’a mise sur ses cuisses, me flattant les cheveux et répétant “you are not a machine”.
- Soda au cumin vigoureusement brassé juste avant de le boire me forçant à l’avaler d’un trait.
- Visite d’un centre de recherche sur les dromadaires et dégustation de lait dudit animal.
- Visite du temple des rats à Deschnock.
La femme indienne est belle avec ses longs cheveux sombres, parfois tressés en nattes. La jeune fille est effilée, réservée, prudente et semble studieuse. La gamine est enjouée et curieuse, elle ne cherche qu’un contact visuel avec l’étranger. Forte et responsable de la maison, la mère travaille du matin au soir et veille au bien-être de la famille. La grand-mère prend parfois le relais pour s’occuper des enfants et travaillera jusqu’à très tard dans sa vie, même lorsque son dos courbé par les charges sera fatigué.
L’homme est souvent immature et semble avoir un certain complexe d’infériorité qui le rend parfois susceptible. Le garçon est déjà un homme, ayant la lourde responsabilité de rapporter de l’argent depuis qu’il est tout jeune. Le gamin est rieur, intéressé et apprend de bonnes et moins bonnes habitudes en observant les adultes. Le père est peu instruit et travaille durement pour subvenir aux besoins de sa famille et s'il en reste, des siens. S’il a de la chance, le vieillard est retraité et profite de la vie. Sinon, ses membres décharnés transporteront des colis aux quatre coins de la ville ou brasseront une casserole noircie par des années de préparation du chai jusqu'à ce que la mort le libère.
- Rencontre de deux jeunes à Jaipur, j’embarque sur une moto avec l’un d’eux en direction du quartier musulman pour acheter un festin dégusté sur une feuille de journal jetée sur une table: biryani au poulet et curry de mouton accompagné de naan cuit au tandoor.
- À la nuit tombée, observation des feux d’artifice sur le toit de la guesthouse à l’occasion de Diwali, la plus grande fête indienne, celle de la lumière.
- Popsicle de crème glacée au safran. Un dessert luxueux coûtant presque le prix d’un repas.
- Déjeuner au Indian Coffee House, un classique de la cuisine du sud avec uttapam (crêpe de riz), idli (gâteau de riz fermenté), beignet de farine de pois chiche et café.
- Courte méditation au centre Vipassana de Jaipur avec Ashok, le mari de la soeur d’une amie, puis promenade dans la forêt en moto et observations des paons sauvages.
- De la musique sort d’un temple à Pushkar, j’entre, m’assied et me laisse bercer par l’écoute d’un mantra chanté sans arrêt depuis plusieurs jours.
- Des jeunes aspergent les rues d’insecticide à moustiques alors que des centaines de gens s’y trouvent. Je me sauve en courant.
Lectue de What Makes You Not a Buddhist de Dzongsar Jamyang Khyentse.
Wisdom is the primary concern of a Buddhist.
22h15. Je suis assis dans un wagon de train avec 25 autres personnes pour les 4 prochaines heures et je réfléchis à la notion de confort; d’autant plus que je contiens tant bien que mal ma diarrhée.
Ma copine et moi avons toujours accordé une extrême importance à la transparence entre nous. En explicitant nos inquiétudes, nos frustrations et nos déceptions à l’autre, nous évitons l’accumulation sournoise et silencieuse de rancoeur nous distançant lentement mais sûrement. Suite à une querelle suivie d’une discussion avec Michael, j’ai réalisé que cette manière d’être gagnerait à être appliquée à toutes les relations. Certaines amitiés ne pourront supporter cette honnêteté extrême, presque crue, alors que les autres s’en trouveront de beaucoup plus authentiques.
J’ai longtemps pensé qu’il se devait d’exister une définition absolue du bonheur et que tous les êtres vivants se devaient invariablement de la trouver puis de la mettre en pratique. Le bouddhisme offre un point de vue différent, proposant que la définition du bonheur varie d’un être à l’autre, i.e. ce qui peut être le bonheur de l’un peut aussi être le malheur de l’autre. Néanmoins, tous les êtres vivants ont en commun la recherche constante davantage de leur bonheur.
Gujarat
Réveil à 5h et départ en rickshaw vers la tête du sentier de Girnar, une petite montagne sacrée au coeur de la péninsule gujarati. La nuit est fraîche et humide, la lune est pleine; je m’accroche à l’arrière et me laisse bercer par le vent.
Des centaines de personnes semblent avoir dormi dans la clairière adjacente et je distingue dans la pénombre de petits cercles de personnes se réchauffant autour de maigres feux.
La montée est plaisante alors que le soleil se lève et révèle le paysage dans l’aube. Beaucoup de demandes de photos; j’accepte pour l’instant. Arrivé au premier sommet, petit chai et je continue. La vue est superbe et la chaleur du soleil commence à se faire sentir. J’arrive finalement au dernier sommet, je tourne en rond autour d’une statue orange sacrée et redescends.
- Je commence à méditer tous les matins.
- Rencontre de Liam, un écossais enseignant l’anglais à Barcelone avec qui je voyage quelques jours.
- Il est minuit, j’écoute Richard Desjardins dans la couchette du haut d’un bus de nuit entre Ahmedabad et Bhuj. L’air frais entre par la fenêtre qui ne se ferme pas complètement. Le monde est vaste et le Québec si proche.
- Quelques centaines de chauves-souris géantes dorment dans un arbre juste au-dessus d’un sentier sur lequel je me promène.
- Pani puri, hamburger sucré de pomme de terre et arachides, crème glacée aux noix de cajous et figues.
- Visite de Mandvi, un petit village de pêcheurs et de constructeurs de bateaux. Rencontre d’un américain qui y vit depuis 1 an et qui nous explique qu’il a besoin de 1000$ pour se sortir d’une situation difficile. Il ne nous en dit pas plus puisqu’il a un rendez-vous et doit se sauver en vitesse. Nous restons perplexes.
- Liam et moi faisons du pouce pour aller voir le désert de sel du Great Rann of Kutch; un camion de l’armée nous embarque et on s’entasse avec des militaires et de l’équipement.
- Rencontre de Yuvruj et discussion sur l’existence de Dieu. Il explique celle-ci par la présence du vent et des vagues. J’essaie de lui démontrer que la science offre des explications à ces phénomènes; il demeure sceptique. Il m’offre de dîner chez lui. Quelques minutes de scooter plus tard et nous sommes dans le salon/chambre/cuisine où il vit avec ses parents. Il m’exhibe devant sa mère, ses oncles, tantes, cousins et amis. J’essaie de garder le sourire malgré la sensation déplaisante d’être considéré comme un objet.
- Milkshake au fenouil.
- Visite d’un zoo en piètre état, les animaux n’ont pas l’air au sommet de leur forme. C’est presque plus fascinant d’observer le comportement des visiteurs que celui des prisonniers.
It’s not a doing, it’s a being.
Promenade de soir dans les rues d’Ahmedabad. À travers motos, scooters, rickshaws, vaches, piétons, chiens et amoncellements de déchets, il y a indéniablement une sensation d’ordre qui émerge du chaos.
L’Inde fourmilière.
- À bord d’un Jeep entre Bagdana et Palitana, j’observe l’aube qui recouvre les champs de coton avec des gros rayons d’or.
- À la recherche d’un accès Internet, je tombe sur une école de réparation de téléphones cellulaires: quelques jeunes, de vieux appareils et une panoplie de petites pièces éparpillées sur une table.
- Montée de Shatrunjaya, un important lieu de pèlerinage Jain où j’ai vu les plus beaux temples de tout le voyage. Heureusement, les photos sont défendues.
- Souper incroyable dans la rue. Départ avec une petite échoppe sur roues servant un riz frit avec de la lime. Un peu plus loin une autre échoppe sert du panipuri avec 8 sortes de bouillons différents, progressant de salé et piquant vers sucré et doux. Encore un peu plus loin, un hamburger garni d’un mélange de pommes de terre rougeâtre. Pour dessert, un lassi avec une boule de crème glacée.
Determination is worth nothing if it bends before temptation.
I do not believe in the doctrine of the greatest good of the greatest number. It means in its nakedness that in order to achieve the supposed good of 51% the interest of 49% may be, or rather should be sacrificed. It is a heartless doctrine and has done harm to humanity. The only real, dignified, human doctrine is the greatest good of all, and this can only be achieved by uttermost self-sacrifice.
- Visite inspirante du Sabarmati Ashram fondé par Gandhi à Ahmedabad.
- Un homme rencontré dans la rue me donne un signet pour le livre que je lis, dessus il est écrit: “We can do no great things, only small things with great love”.
We can do no great things, only small things with great love
Lecture de Siddharta de Herman Hesse.
When someone is searching, then it might easily happen that the only thing his eyes still see is that what he searches for, that he is unable to find anything, to let anything enter his mind, because he always thinks of nothing but the object of his search, because he has a goal, because he is obsessed by the goal.
Wisdom which a wise man tries to pass on to someone always sounds like foolishness.
Uttar Pradesh
Rencontre de Michal, une psychologue israélienne avec laquelle je voyage 3-4 jours. Nous discutons beaucoup et elle me fait réaliser que ce n’est pas réaliste d’attendre de sa copine qu’elle partage tous nos intérêts. Au contraire, il est sain de cultiver des cercles différents pour chacune de ses passions.
Lecture de Such a Long Journey de Rohinton Mistry
He learned to disdain the overlong sojourn and the procrastinated departure, for they were the progenitors of complacent routine, to be shunned at all costs. The journey - chanced, unplanned, solitary - was the thing to relish.
When in doubt, keep doubting.
- Promenade en vélo à Orchha. Une seule vitesse, des freins qui semblent bien fonctionner et beaucoup de plaisir à me perdre dans les chemins de campagne. Baignade dans un endroit de la rivière qui semble propre.
- Khajuraho sera le pire endroit que je visiterai pendant le voyage.
- Souper avec un super thali: chutney sucré et sûr, chutney acide et piquant, curd, mélange de légumes, aloo matar, dal, riz et chapati.
Dîner avec un pulao veg et un lassi à la vanille, puis je m'éloigne de la ville pour lire et profiter de la campagne. Le bétail mange tranquillement, des enfants se promènent sans avoir de but précis et un rickshaw fait des aller-retour dans la ville avec sur son toit des haut-parleurs crachant des slogans politiques. Deux garçons s’assoient à côté de moi et sortent une petite boîte de métal contenant 4 chapatis et du achar (pickle indien), c’est leur dîner. Nous discutons brièvement, refroidis par la discussion peu fluide. Comme la plupart des rencontres, celle-ci se termine par l’habituelle demande d’argent.
- Rencontre de Warun, le propriétaire de la guesthouse où je loge à Chitrakoot. Il a une maîtrise en management rural et s’intéresse aux bienfaits qu’une démarche spirituelle peut apporter au management. Nous avons beaucoup de plaisir à partager nos expériences provenant de sphères tellement différentes.
- J’observe des dizaines d’hommes et de femmes particulièrement dévots parcourir 5km en s’étendant au sol à chaque pas.
- Visite chez un sadhu vivant sur le bord d’une rivière à l’écart de la ville. Il ne parle pas un mot d’anglais alors en guise d’accueil nous fumons un “shilum” de tabac et de marijuana.
Réveil matinal au rythme des dévots se baignant sur le ghat d’en face. L’aube se lève, il fait assez froid pour que je m’enroule dans un châle et que de la condensation se forme à partir de ma respiration. J’observe la scène du haut de la terrasse de l’hôtel en buvant un chai brûlant. Les femmes se regroupent et exposent parfois un sein sans grande gêne. Des enfants se promènent entre les baigneurs pour vendre leur lot d’offrandes. Les vendeurs d’objets dévotionnels préparent leur emplacement pour la journée qui ne fait que débuter. Des jeunes raclent le fond de la rivière près des ghat en espérant récolter quelques pièces de 1 ou 2 roupies. Un attroupement de singes se déplacent sur les toits et les corniches des bâtiments surplombant le brouhaha matinal. L’aube se lève; la journée est commencée.
- Je me sens particulièrement mal d’avoir eu à utiliser les services d’un rickshaw à vélo qui m’a transporté avec mon sac à dos dans le trafic d’Alahabad, respirant les vapeurs de diesel et la poussière sous une chaleur insupportable, pour moins d’un dollar.
- Observation des crémations ayant lieu sur le bord du Ganges à Varanasi. L’ambiance est chargée d’émotions, et l’air de fumée.
- J’assiste à un petit concert de musique indienne. La première partie est composée d’un duo de tabla et cythare, produisant une musique splendide et émouvante. La seconde partie consiste de tabla et d’harmonium ainsi que d’un danseur muni de clochettes aux chevilles. La danse est rythmée, intense, presque violente et allie force, rapidité et fluidité. Le danseur termine en sueur sous les applaudissements de la petite audience.
- Des hommes lavent des vêtements en les trempant dans les eaux du Ganges puis en les frappant sur une roche plate jusqu’à en essorer la plus grande partie. C’est ironique de laver quelque chose dans une eau aussi polluée. Quoique c’est aussi ça l’Inde, agir par nécessité.
- J’observe que les Indiens semblent moins enclins, comparé aux Marocains par exemple, à considérer la société Occidentale comme supérieure. Certes, ils adoptent certaines coutumes américaines, mais semblent également conscients des effets néfastes de notre style de vie.
Je réalise maintenant à quel point je peux être rigide et fermé aux opinions différent des miens. J’ai souvent considéré cette caractéristique comme une force, mais je vois maintenant que c’est quelque chose qui, comme bien d’autres, doit être soigneusement balancé. En plus d’être difficile pour les autres, je crée également une souffrance majeure en moi. Comme la souffrance provenant des autres habitudes malsaines, je m’y suis vicieusement habitué avec le temps jusqu’à prendre ce poids comme faisant naturellement partie de moi.
Our own opinion is something we are generally very attached to.
Kolkata
- Le “Howrah bridge”, célèbre pont banc de Kolkata, ressemble beaucoup au pont de Québec.
- Rencontre fortuite de l’américain croisé à Mandvi il y a presque 1 mois. Il me raconte finalement son histoire, expliquant comment il a acheté et retapé un voilier en bois de 32 pieds dans le but de traverser la mer d’Oman entre les côtes de l’Inde et celles de l’Arabie. Depuis 1 an les autorités l’empêchent de partir, prétextant des problèmes administratifs sans fin et laissant entendre que les choses pourraient s’arranger moyennant un pot de vin. Il pense maintenant à fuir l’Inde, qu’il déteste, et tenter d’entrer en Oman.
- Visite du vieux quartier chinois de Kolkata, il n’en reste pas grand-chose.
- Promenade reposante aux jardins botaniques.
- Découverte de mon côté égocentrique.
Suite à de nombreuses rencontres, j’ai confirmé une impression que j’avais depuis quelque temps; la nature humaine est fondamentalement bonne.
À travers ce voyage j’ai découvert à quel point l’inconfort offre un terreau fertile pour le travail sur soi. Mes propres défauts, tendances et traits de caractère se sont matérialisés devant moi, rendant impossible de continuer à les ignorer. Pour l’une des premières fois de mon existence je me suis observé changer au gré des jours.
À mon avis, l’étape la plus difficile n’est pas de prendre conscience d’un défaut ni de travailler à le faire disparaître, mais plutôt de ressentir un désir de changement suffisamment profond, nécessaire pour commencer à l’éradiquer.
À chaque jour qui passe, nous devenons un peu plus nous-mêmes.